jeudi 24 février 2022

Crise en Ukraine : « Face à la Russie, les Américains considèrent que l’implication des Européens dans l’OTAN est dans leur intérêt »

 Dans un entretien au « Monde », Edouard Simon, directeur de recherche à l’IRIS, explique comment la crise ukrainienne peut influencer les relations entre les partenaires de l’OTAN.



A peine entré en fonctions, le président américain, Joe Biden, a affirmé sa volonté de reconstruire les alliances de l’Amérique, notamment l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), dédaignée par son prédécesseur, Donald Trump. Mais l’année 2021 a été marquée par son lot de déceptions pour les partenaires des Etats-Unis. En août, ils n’ont pas été consultés sur le retrait d’Afghanistan. En septembre, la crise des « sous-marins australiens » qui a consacré la nouvelle alliance entre Australie, Royaume-Uni et Etats-Unis, a provoqué la colère de la France et suscité l’inquiétude au sein de l’organisation.

C’est une question qui s’est posée pendant longtemps, mais qui n’a jamais été totalemFace à la crise ukrainienne, les membres de l’OTAN affichent leur unité. Mais à quoi a servi l’OTAN depuis la fin de la guerre froide ?
ent tranchée. La mission principale et historique de l’OTAN, qui n’a jamais totalement disparu, est la défense de l’Europe en pleine guerre froide vis-à-vis de la menace de l’URSS.
L’OTAN a eu la tentation de devenir un acteur global : c’est un peu ce qu’on a vu en Afghanistan, à partir de 2001 ; la première et seule fois où l’article 5 de la charte [qui oblige à se porter au secours d’un membre attaqué] a été invoqué, pour venir en aide aux Etats-Unis après le 11-Septembre. Dès le départ, l’OTAN a joué le rôle d’une force d’appoint et de soutien à l’opération américaine, puis de remplacement des troupes sur place.

Depuis l’arrivée au pouvoir de Joe Biden, on observe une inflexion dans ce que les Etats-Unis attendent de l’OTAN : l’ouvrir aussi à de nouveaux espaces, de nouvelles formes de conflictualité, notamment à la Chine. La récente crise entre l’Ukraine et la Russie a récemment rappelé (tout comme la précédente crise de 2014, qui avait abouti à l’annexion de la Crimée par la Russie) la pertinence de la mission historique de l’OTAN.
La présence américaine sur le territoire européen n’est pas énorme. Mais l’OTAN dispose également d’une force de réaction, qui compte environ 40 000 soldats. Et ses troupes, ce sont aussi potentiellement celles des alliés.

Les pays européens dépensent beaucoup d’argent sur leur défense, en cumulé, mais ils le dépensent mal. Avec la création du Fonds européen de défense au niveau de l’Union européenne [UE] et les hausses de budget depuis 2014, des efforts ont été consentis au niveau capacité, pour faire en sorte qu’il n’y ait pas un déclassement stratégique, mais peu de choses ont avancé sur le plan opérationnel. Et là, il va y avoir un besoin d’avancer.

Dans le cadre du débat sur la « boussole stratégique européenne » [les orientations stratégiques de la politique de sécurité et de défense commune – PSDC], on parle d’une capacité européenne de réaction rapide, mais on ne sait pas vraiment quelle forme celle-ci va prendre. Mais il y a une pression de la part des Américains pour que les Européens renforcent leur contribution à l’effort et à la sécurité du continent européen, contribution qu’ils veulent voir de moins en moins réduite à la seule question de la hausse des budgets. Face au défi que représente la Chine, les Etats-Unis ont sans doute intérêt à ce que les Européens soient plus autonomes militairement.

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